jer.me : le blog de Jérôme Bouteiller
Madoff, caricature ou exemple du système ?
Après l’éclatement de la bulle immobilière, de celle des crédits ou de celle des matières premières, le système financier, déjà exsangue, vient d’être victime d’un nouvel épisode particulièrement consternant : l’affaire Madoff. Selon la presse économique, ce prestigieux investisseur aurait monté une pyramide financière au coeur de Wall Street dont l’ampleur donne le tournis : 50 milliards de dollars.

La dernière fois que j’ai entendu parler de ce type d’arnaque, (où les derniers investisseurs payent les rendements extravagants promis aux premiers investisseurs, jusqu’à l’effondrement du système), c’était dans l’Albanie des années 90. Mais malgré les enquêtes de la SEC, Madoff aurait réussi à implanter sa pyramide au coeur de la finance internationale, plumant au passage de grandes institutions financières déjà ruinées par les subprimes, la faillite de Lehman Brothers et autre effondrement des bourses...

Cette affaire me semble symptomatique d’un système financier devenu fou, finalement pas si éloigné de l’arnaque de Madoff. Ces dernières années, la rentabilité des marchés était en effet extravagante et les cours des matières premières, des actions ou des immeubles était lui même maintenu par l’arrivée de nouveaux pigeons, qui par leurs achats, ne faisaient qu’enrichir les premiers investisseurs. Mais comme pour Madoff, le système n’a tenu qu’un temps et il s’est lui même effondré.

On pourrait en rire, pointer du doigt ces « spéculateurs » dont l’enrichissement ne s’accompagne d’aucune prise réelle de risque, ironiser sur ces « libéraux » qui appellent désormais l’Etat à l’aide, moquer ces « grands bourgeois » qui pratiquent finalement des arnaques dignes des mafia d’Europe de l’Est. Malheureusement, leurs agissements jettent déjà des millions de gens à la rue (crise immobilière), privent des centaines de millions de pauvres gens de nourriture (spéculation sur les matières premières), et risquent dès 2009 d’entraîner une faillite des fonds de pension, se traduisant par une ruine pure et simple de dizaine de millions de retraités.

Je n’ai pas de solution miracle mais je suggère trois pistes de réflexion :
1 / Je trouve anormal que la rente soit plus lucrative que le travail. Il y a une réflexion à mener sur les taux d’intérêt réels, positifs depuis 30 ans, ce qui n’était pas le cas pendant les 30 glorieuses. Un de mes profs d’économie parlait de « revanche des créanciers » depuis les années 70. Les « débiteurs » doivent sans doute envisager la contre-attaque en militant pour des taux d’intérêt réels nuls voire négatifs.
2 / La rémunération du risque. Je trouve normal qu’un entrepreneur, qui prend des risques, puisse un jour faire fortune. Je trouve anormal qu’un banquier, qui ne prend pas de risque personnel voire qui en fait prendre à ses clients, puisse faire fortune. Ils mettent juste leur main dans le pot de confiture. Il est temps de fermer le couvercle.
3 / Le « marché » défend des intérêts particuliers à court terme. Je ne crois pas que l’intérêt général soit une somme d’intérêts particuliers et je pense que les Etats, qui reposent encore sur le vote démocratique, doivent désormais reprendre le contrôle des marchés financiers. Cela passe par un contrôle des transactions, la lutte contre les paradis fiscaux, la nationalisation des structures de « rating » et certainement la mise en place d’une fiscalité comparable pour les revenus du travail et ceux de la rente.

La dernière conférence internationale a évoqué ces pistes mais n’en a appliqué aucune. La crise systémique n’est en tout cas pas terminée et je crains qu’il faille attendre les prochaines grandes faillites de cet hiver pour passer à l’action.

Tags : crise madoff

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Polisphère

Lundi 22 Décembre 2008