jer.me : le blog de Jérôme Bouteiller
Saint Augustin
Depuis 1954, l'abbé Pierre représentait en France les sans domicile fixes dans leur combat légitime pour avoir simplement un toit au dessus de la tête. Comme le soulignent avec sarcasme les guignols de l'info depuis quelques semaines, le combat de l'abbé n'a toutefois jamais été d'une grande efficacité même si la responsabilité de cet échec incombe en premier lieu aux Français dans leur ensemble et à leurs représentants politiques des 50 dernières années. Malgré l'émergence d'autres figures comme Jean-Baptiste Eyraud, de l'association"Droit au logement", c'est un véritable inconnu, un certain Augustin Legrand, porte parole de l'association des Enfants de Don Quichotte, et jusqu'à présent connu pour ses quelques expériences de comédien, qui est en train de réussir l'incroyable pari que n'a jamais remporté le vénérable abbé : rendre le droit au logement opposable aux élus. Soignant la forme (deux mois de camping sauvage aux bords du canal saint martin), le fond (une revendication politique légitime et pouvant être votée immédiatement) et le bon timing (pré-campagne électorale), le Grand Augustin a été entendu par les médias, les élites de la République et son Président. Je trouve cette action formidable. A court terme, elle va changer les modes d'hébergement des SDF; A moyen terme, elle va encore accélérer la reprise de la construction de logements (il en manque encore 800.000 en France). Enfin, sur le long terme,elle réhabilite l'action politique et montre qu'un gars déterminé et habile peut changer le monde.



4 commentaires

Polisphère

Mardi 2 Janvier 2007

Commentaires

1.Posté par JUL le 03/01/2007 16:57
Quid du coût de la construction de ces "800 000 logements" ? Est ce compatible avec la baisse de l'impot promise ?

2.Posté par jerome le 03/01/2007 17:36
c'est pas forcément incompatible. Dans les hauts de seine, certaines communes vendent les logements HLM aux locataires à un tarif raisonnable. Les gars sont trop contents de devenir proprios et en échange, l'office HLM des hauts de seine a les fonds pour construire de nouveaux logements. Depuis que Borloo est au ministère du logement, le rythme des constructions a doublé et devrait atteindre 450.000 par an. Selon lui, la crise sera terminée d'ici 3 à 4 ans, le temps que tout soit fini. Sur ce terrain, quel que soit le candidat UMPS, personne ne fera marche arrière.

3.Posté par alexsailing le 04/01/2007 14:14
Je trouve l'initiative super et suis vraiment satisfait des décisions prises, même si surement il faudra des ajustement.
Par contre je m'interroge un peu plus sur le fait que nos responsable politiques ne semblent plus avoir la main mise sur les initiatives.
N'est ce pas une remise en question de nos instituions?
Qu'elle est la place du Buzz dans notre société?

Sur la fond je pense aussi à Nicolas Hulot...

Autre chose, petit cadeau, la visite interactive et géosphérique du voilier de Bertrand Delesne sur son blog consacré à sa participation à la mini transat 2007.
http://bertranddelesne.typepad.fr/bertrand_delesne_objectif/2006/12/bienvenue_a_bor.html#comments

4.Posté par khal torabully le 22/01/2007 23:26
Madame, Monsieur, Amie, Ami,
Acceptez, je vous prie ce texte, que je dédie à la mémoire du Gandhi français, que vous pourrez utiliser à votre guise.

Acceptez, je vous prie, ma vive amitié.
Khal Torabully
Ecrivain

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L'abbé Pierre. Le Gandhi français s'en est allé : le testament de l'insurgé de la bonté demeure…

"Le seul voyage qui vaille est celui qui s'accomplit de l'intérieur". Rainer Maria Rilke

Entre le Gange, le Congo, la Rivière Noire et la Seine : est parti le Gandhi français, qui mit sa vie au service des sans parole, des sans toit et des humbles trop souvent humiliés.
Un Mahatma, une grande âme s'en est allée.
L'homme qui fut l'apôtre des parias.
Qu'il me soit permis, tout simplement, de lui dédier ces fragments poétiques, car nous sommes tous légataires du testament de cet insurgé de la bonté.
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Pour l'abbé Pierre, ce fils lumineux de la ville Lumière :

Ce matin, je me suis réveillé sans toi,
Comme un mendiant paré de soleil.
Je sais que ce jour est l'instant solennel,
Que Sa clarté prend en charge.

Tout ce qui est sans toit est en toi.

Je froisse tant d'univers pour être
A l'écoute de ton absence.
Que me vaut ce cœur au profil distinct
Si je ne parle pas de toi ?
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Et je me rappelle ces mots de Nazim Hikmet :

„Quand on a un coeur d'un poids respectable,
Il faut se battre contre des moulins à vent, mon don Quichotte…"

Les tentes sont entre Rhône et Saône. Sur la place Bellecour, en ta ville natale, ce Lyon des Canuts où maintes révoltes peuplent les cris des affamés…
Ce Lyon où l'exil fut l'apprentissage des précarités.
Oui, il nous faut d'autres humains au coeur de ce poids, l'abbé…
Encore là :
Desmond Tutu, prix Nobel de la Paix, sud africain et conscience forte des démunis de toute terre,
Muhammad Yunus, banquier des pauvres au Bangla Desh et dans le monde socialement fracturé,
du Mississipi au fleuve Amour, don Quichotte.
D'autres Pierre en guerre contre la pauvreté grandissante…
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Je te sais égaré dans ta ville, la leur,
Ce pays où les gueux cheminent
Dans l'inhumaine condition…
Je te sais sans masque, sans détresse,
Mais triste de toutes ces fins du monde,
Frissonnant comme le verbe dans la bouche du muet.
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L'abbé, tu as pourfendu les mensonges de l'homme le plus puissant au monde, livré à la guerre dans l'ancienne Mésopotamie. Tu as parlé de cet « irresponsable » qui parlait de croisade comme un « ignorant », car « les croisades sont aussi abominables que toutes les guerres ».
Faire la croisade et la jihad, avant tout, c'est lutter contre ses passions, ses égoïsmes, son indifférence aux humains.
Oui l'abbé, « Tuer au nom de Dieu c'et gifler Dieu ».
Tu l'as dit bien avant beaucoup à Sarajevo,
toi qui voulus la relation avant la confrontation, le respect avant le préjugé.
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Voici, pour les démunis de toi, le testament de l'insurgé de la bonté :

Sans aucun doute, le monde est inexact.
Sans l'espérance, il n'est rien d'autre.

Capituler ? Ainsi le premier mot lâche se nomme.

L'insurrection ! La parole est comme l'été
Dans la ruche assourdissante :
Elle dresse les tentes sur le Jourdain,
Elle dresse les toits sur la tête des damnés.
Elle pense mon indifférence, et c'est cela
L'intimité qui m'adosse à l'insurrection de l'amour.

Je brisererai mon indifférence
Comme je cherche les yeux de ma mère.
C'est l'hospitalité qui nous libérera de l'exil.

Tu n'es pas la non-personne d'en face.
Tu es la face cachée de ma personne.
Que ta fenêtre se referme sans bruit,
Il n'y a plus aucune porte en moi.

Le monde qui fuit descendra dans ta bouche.

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S'il y a tant de mots dans la ville,
Ce que tu précèdes les vitraux bleus
Aux fontaines de l'eau fraîche.

J'ai connu tant de palais en toi,
Les veillées de chandelles mortes,
Ces mondes évaporés dans l'horizon.

J'évoquerai enfin ta voix insurgée,
Quand la fleur aura fané le poignard,
Quand la flamme aura brûlé la lâcheté.

Je n'aurai d'autre mot que ton silence,
Ce cœur pieux au seuil admirable.
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Toi qui voulus qu'on qu'écrive sur ta tombe « J'ai essayé d'aimer », ou encore « J'ai fait ce que j'ai pu », toi qui en toute humilité affirma que « la foi n'apporte pas la clarté » - certainement, une volonté de bâtir un toit pour y accrocher une lumière pour l'autre - toi qui fus, jusqu'au bout, blessé par toutes les cruautés du monde, tu nous as légués le testament de la bonté, notre testament de l'insurgé de l'amour.

Khal Torabully


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